Histoires de frontière


Tout au long de la frontière, il y a des endroits intéressants du point de vue historique ou géographique, ou à cause d’un tracé bizarre. Mes remerciements à mon ami François Chastellain qui a rédigé la quasi-totalité des textes qui suivent.

1.  Dreiländereck de Bâle . . . et les autres

Le monument érigé à Bâle sur la rive suisse du Rhin est bien connu. Il symbolise le point frontière commun à 3 pays: La Suisse, la France et l’Allemagne (mais le vrai tripoint se trouve à 150 m au milieu du fleuve).

Les 5 autres tripoints sont moins connus et pour certains moins accessibles:

  • Le Mont Dolent. La frontière entre la Suisse, l’Italie et la France ne se trouve pas au sommet mais 71 m plus bas à la jonction de l’arête nord et l’arête ouest.
  • En Basse Engadine, dans la pente nord du Piz Lad, 628 m en dessous du sommet (Suisse/Italie/Autriche).  Il s’agit d’un roc de calcaire situé sur la frontière entre la Suisse et le Tyrol (Autriche), qui était converti en borne entre les trois pays en 1920, lorsque le Tyrol méridional est devenu italien après la Première Guerre mondiale. Une plaque de marbre avec les initiales des trois pays y était fixée par l’Italie.
  • Deux tripoints entre l’Autriche, la Suisse et le Liechtenstein, l’un sur le Naafkopf, l’autre au milieu du lit du Rhin.
  • Le dernier, entre l’Autriche, l’Allemagne et la Suisse, au milieu du Lac de Constance, mais il n’y a aucun accord international qui le spécifie!

Pour en savoir plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Dreil%C3%A4ndereck_%28B%C3%A2le%29

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1a. Benkenspitz ou Bänggenspitz

La limite municipale dans la forêt au nord-ouest de Biel-Benken s’enfonce comme un coin entre les communes françaises Neuwiller et Leymen.  Je soupçonne que cette bande de terre était une ancienne réserve de chasse.  Biel-Benken fut vendu en 1526 par les chevaliers de Schaler (château Schalberg, Pfeffingen) à la ville de Bâle.  Ce tracé étrange de la frontière dans le Benkenspitz était documenté en 1620 par le peintre bâlois Hans Bock l’Ancien (1550 – 1624) dans une carte pour le compte du gouvernement bâlois.  La frontière fut passée en revue en 1746 et le marquage complété.  Les bornes ont reçu la crosse d’évêque bâloise sur les côtés Biel-Benken.  Une autre vérification a été effectuée en 1816.

L' »entrée » au Benkenspitz – « Entre les Holzmatten » – large de 62 mètres environ est la partie la plus étroite de la Suisse!  (69 mètres entre les bornes 126 et 109.)

Pour en savoir plus:
http://www.3sf.ch/fileadmin/Jermann/pics/3sf.ch/Flyer_und_Talon/Stein_02_Flyer_Web.pdf
https://www.geocaching.com/seek/cache_details.aspx?wp=GC3HGNJ&title=im-banggenspitz-spitz

Photo 1: Carte de Hans Bock http://www.regionatur.ch/Themen/Personen/Kartografen
Photo 2: Borne à l’extrémité du Benkenspitz

Rodersdorf Buche

1b. Le plus grand hêtre du Nord-Ouest de la Suisse

Au nord-ouest de Rodersdorf, une municipalité du canton de Soleure, il y a un énorme hêtre, situé 5 mètres environ à l’intérieur de la frontière suisse.  Il se trouve à environ 455 mètres d’altitude au milieu d’une forêt, entre les bornes 61 et 62

Comparé à un hêtre prêt à être récolté, cet exemplaire impressionnant possède un diamètre trois fois plus grand et le volume de son bois est même dix fois supérieur.  Sa hauteur est d’environ 40 m et son volume est estimé à 35 m3.  Une particularité de ce hêtre: son long fût sans branches qui se sépare seulement à une hauteur de 17 mètres en trois fourches de même taille.

Pendant la 1ère et la 2ème Guerre Mondiale, ce hêtre a fait du « service actif » comme poste d’observation pour l’armée suisse. Ce service lui a d’ailleurs presque coûté la vie. Pendant la 2ème Guerre Mondiale les habitants de Rodersdorf l’ont défendu contre la Wehrmacht allemande qui essayait de l’abattre.

Pour en savoir plus:
https://www.so.ch/fileadmin/internet/vwd/vwd-awjf-wald/pdf/Waldwanderungen/Mariastein/WWSo_Nr_5_Postentafeln_46-55.pdf (voir panneau no. 47)

2. La rive droite du Doubs

A la différence des autres frontières fluviales (le Rhin, Le Rhône en aval de La Plaine, l’Inn en aval de Martinsbruck), la frontière le long du Doubs entre le lac des Brenets et le lieu où la rivière entre en Suisse en amont de Soubey, ne passe pas par le milieu du Doubs mais le long de sa rive droite. Le Doubs est donc entièrement français dans cette portion et le pont de Goumois aussi!
Image à gauche: Le pont (français!) de Goumois.

Cette particularité a une explication historique : Louis XVI et le prince-évêque de Bâle ont conclu un accord en 1780. En cédant ses droits sur la rive gauche du Doubs, le prince-évêque recevait en échange Boncourt, Bure et d’autres possessions sur la rive droite.

Pour en savoir plus :
http://www.eau21.ch/etude_33.html

3. Le glissement de la Vraconnaz

En contrebas de la 1ère borne frontière Vaud/France en venant du canton de Neuchâtel, près du col des Etroits, se trouve la magnifique tourbière, ou «Mouille », de la Vraconnaz (prononcez : Vraconne) située en légère descente.

Il y a bientôt 30 ans, dans la nuit du 26 septembre 1987, la couche supérieure faite de tourbe s’est détachée et a glissé sur 300 mètres vers la colline de la Sécha. De paysage lisse couvert de sphaignes et d’airelles des marais, la tourbière s’est transformée en un amoncellement de tas informes. Le temps a fait son œuvre et les traces du glissement ne sont plus aussi spectaculaires qu’en 1987. Digne de protection, la tourbière devient la première réserve naturelle de Suisse en 1911. Elle est aujourd’hui propriété de Pro Natura et jouit d’une protection depuis les années 1990 en vertu de son statut de haut-marais et de site marécageux d’importance nationale.

Pour en savoir plus :
http://www.pronatura-vd.ch/id-32014-la-mouille-de-la-vraconnaz

Vieilles bornes VD

4. Les bornes de la frontière entre Vaud et la France

Il n’y a pas moins de 309 bornes, sans compter les bornes intermédiaires, entre La Suisse et la France en territoire vaudois. Certaines d’entre elles remontent au XVIème siècle, soit bien avant les géomètres!

Jean-François Robert, ingénieur forestier et ancien chef du Service cantonal vaudois des forêts a fait œuvre utile en inventoriant ces bornes (voir référence ci-dessous). Dans cette brochure illustrée par l’auteur, on apprend presque tout sur les dates et symboles gravés sur ces vieilles pierres. On y apprend aussi que lorsque la borne était érigée, on plaçait en dessous de celle-ci un volume équivalent à 1 dm3 de charbon de bois ainsi que deux témoins provenant de la cassure en deux d’une brique, susceptibles d’être reconnus par leur rapprochement. Pourquoi? Mystère!

Pour en savoir plus :

  • Vieilles bornes en pays de Vaud, J.-F. Robert, édition «L’industriel sur bois », 1980, 30 pages (la brochure est disponible au musée de l’Arboretum à Aubonne).
  • Histoire de bornes, O. Cavaleri, éditions Slatkine, 2011-2014 (4 brochures sur les bornes franco-suisse)
Traité vallée Dappes

5. Le traité de la vallée des Dappes

Il n’existe pas beaucoup de rectifications de la frontière suisse depuis le congrès de Vienne en 1815. Le traité de la vallée des Dappes est une notable exception.

Signé en décembre 1862, le traité des Dappes mettait fin à une ancienne revendication de la France. Après moult péripéties et va-et-vient de territoires, le traité signé entre le Conseil fédéral suisse et «Sa Majesté l’Empereur des Français» définit avec précision l’échange de territoires (environ 700 hectares).

Dans son article 3, le traité prévoit : «Les habitants originaires de la partie de la Vallée des Dappes qui revient à la France, en vertu du présent Traité, demeureront Français, à moins qu’ils ne déclarent, dans le délai d’une année, opter pour la nationalité Suisse, auquel cas ils pourront conserver leur domicile et leur établissement sur le territoire de l’Empire». Un paragraphe équivalent règle le sort des Français qui se sont retrouvés en Suisse.

Pour en savoir plus :
https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/18620007/186302200000/0.132.349.24.pdf

St-Gingolph 1944

6. L’incendie de St-Gingolph

Au matin du dimanche 23 juillet 1944, des soldats allemands mettent le feu au village frontière de St-Gingolph en représailles d’une attaque des maquisards savoyards la veille. Un immense incendie, bien visible depuis la côte suisse, détruit plus de 80 maisons essentiellement en bois. Plus de 300 habitants de la partie française se réfugient dans la partie suisse.

L’église, partagée par les deux communautés, sera sauvegardée grâce à l’intervention du colonel-brigadier suisse J. Schwarz qui a négocié avec les Allemands. A noter également le geste du soldat allemand Hartmann qui, malgré les ordres, traverse la frontière, s’empare d’une lance à incendie et asperge l’église menacée par les flammes pour la protéger.

Pour en savoir plus :
http://www.livresdeguerre.net/forum/contribution.php?index=39320&surl=UF

Voir aussi:

http://www.24heures.ch/vaud-regions/riviera-chablais/fusiller-nazis-mis-temps/story/19141083

La Montagne et ses Noms

7. Cervin ou Servin ?

Dans son ouvrage « La montagne et ses noms », Jules Guex, toponymiste renommé et patoisant émérite, a consacré tout un chapitre au nom français du Matterhorn, sujet d’âpres discussions chez les linguistes du siècle passé.

L’auteur remarque tout d’abord que si les passages ou cols fréquentés recevaient un nom au moyen âge, il n’en allait pas de même pour les montagnes environnantes qui, avant l’ère de l’alpinisme, n’intéressaient pas les voyageurs. Le col du Théodule a porté différents noms dans le passé dont celui de Mons Silvius (en latin mons peut aussi signifier col). L’origine de silvius doit être recherchée dans silva « où il y a des forêts ». Par la suite, le nom du col a été attribué à la montagne comme Mont Servin jusqu’à ce que Horace-Bénédict de Saussure le renomme – peut-être à la suite d’une erreur orthographique – Mont Cervin.

Jules Guex conclut par ces mots : « Si le service topographique fédéral (aujourd’hui: Office fédéral de topographie) veut respecter la vérité historique et linguistique, attestée par les documents les plus anciens, il inscrira à l’avenir sur nos cartes : Matterhorn / Monte Servino / Mont Servin ». Jules Guex n’a pas été entendu !

Pour en savoir plus :
La montagne et ses noms, Jules Guex, éd. Rouge 1946, 2 ème éd. Pillet Martigny 1976

Gondo 2000

8. La catastrophe de Gondo

On a tous en mémoire la tragédie du village frontière de Gondo le 14 octobre 2000. Un glissement de terrain causé par des pluies diluviennes avait emporté une partie du village, éventrant la tour Stockalper et tuant 13 personnes, soit environ 10% des habitants.

Cette tragédie a engendré un élan de solidarité jamais vu auparavant puisque 700’000 Suisses ont versé un don pour la reconstruction du village.

La tour Stockalper, construite par la puissante famille de négociants haut-valaisans a été réparée et ré-ouverte en 2007. Attenant à l’hôtel, on peut visiter un petit musée consacré aux mines d’or que la famille Stockalper avait exploitées dès le 17ème siècle. Les quelques vrenelis de l’or de Gondo encore existants ont atteint une cote considérable (jusqu’à CHF 68’000.- !).

Pour en savoir plus :
http://www.rts.ch/archives/tv/information/3438595-gondo-sinistre.html (vidéo 8 min)

Simplon porte

9. A l’aplomb du tunnel du Simplon

Sur l’arête entre la Punta Terrarossa (ou Wasenhorn) et la Punta d’Aurona (ou Furggubäumhorn) se trouve une borne à 2815 m, située exactement à l’aplomb du tunnel du Simplon qui traverse la montagne près de 2100 mètres plus bas, et à 100 mètres d’un sommet intermédiaire qui s’appelle le Tunnelspitz.

La construction du premier tunnel entre 1898 et 1905 a été héroïque – plus de 45°C à l’intérieur du tunnel ! – car les foreuses hydrauliques étaient encore rudimentaires. On peut en voir une ainsi que la porte de fer destinée à stopper l’eau du chantier au Palais de Rumine à Lausanne (dans une grotte, au bout de l’aile à gauche des escaliers monumentaux de l’entrée).

L’ouverture du tunnel en 1906 permettait un gain de 13 heures de trajet sur la distance Lausanne-Milan !

Pour en savoir plus :
http://www.lausanne.ch/thematiques/culture-et-patrimoine/culture-a-vivre/musees/adresses-musees/musee-historique-lausanne/mhl/expositions/passees/creusez-les-alpes/extrasArea/00/links/0/linkBinary/DP_Creusez_Alpes.pdf

Griesgletscher

10. Le glacier de Gries, et ce qu’il en reste…

Le glacier de Gries, qui longe la frontière italienne, se prête bien à une illustration du réchauffement climatique. Dans les années 70, le front du glacier venait vêler dans la retenue d’eau créée par la construction du barrage en 1965. On pouvait même voir flotter quelques icebergs (de taille très modeste) dans le lac situé en contrebas du col frontière de Gries.

40 ans plus tard, plus de glace dans le lac… Ce qu’il reste du glacier s’est retiré dans la montagne.

On voit dans la photo du bas l’éolienne installée en 2011 par SwissWinds. Ce projet pilote à 2465m d’altitude est le plus haut d’Europe.

Pour en savoir plus :
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F8801.php
http://www.rts.ch/info/suisse/3430066-une-eolienne-a-2465-metres-d-altitude-en-valais.html

Craveggia

11. Les bains de Craveggia

En haut de la sauvage vallée d’Onsernone, juste à la frontière en territoire italien, se trouvent les ruines des bains de Craveggia. Ce fond de vallée est assez particulier car la route de desserte mène en Suisse et seuls quelques sentiers escarpés permettent de rejoindre Craveggia dans les Centovalli.

De l’eau à 28°C de type sulfatée-sodique de faible minéralisation (<300 mg/l) a été captée dès le moyen âge et un bâtiment a été construit au début du XIXème siècle pour recevoir les baigneurs. Avalanches et inondations successives ont eu raison du site mais on peut encore se baigner dans le seul bassin encore existant.

Un projet de Parc National Locarnese dont le Valle Onsernone richement boisé est le cœur est en cours d’élaboration.

Pour en savoir plus :
http://www.beat-glauser.ch/vocaglia_bilder_8.htm
http://www.naturfreunde.ch/magazin/rubriken/detail/?tx_ttnews[tt_news]=74&cHash=732b467e79beb62dab2ed39cf2aa941c

12. L’isolement d’Indemini

La frontière entre le Tessin et l’Italie est parfois capricieuse. Indemini se trouve au fond du Val Veddasca italien, 500m après la frontière. Jusqu’en 1920 les seuls accès au village étaient des sentiers au travers les montagnes au Gambarogno au nord ou une piste à peine carrossable dans la vallée au sud. En 1920 une route suisse audacieuse a été construite en passant par l’Alpe di Neggia à 1395 m afin d’assurer un accès national aux habitants d’Indemini. Par contre, la liaison avec le Val Veddasca date seulement de 1966.

Un car postal relie le village à Magadino par une route sinueuse : pas moins de 132 virages et 38 épingles à cheveux ! Mais l’isolement d’Indemini a peut-être permis de conserver un village tessinois authentique et homogène dont les maisons sont construites avec du gneiss de l’endroit, recouvertes de granit et parées de beaux balcons de bois.

Pour en savoir plus :
http://www.myswitzerland.com/fr-ch/indemini-le-village-romantique-tout-en-pierre.html

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12a. Bornes frontières de 1559

Nous sommes tombés sur une vieille borne frontière au nord de Stabio, au Mendrisiotto, Tessin: le no. 123, avec les inscriptions « LIGA HELVETICA » et 1559 d’un côté et « STATUS MEDIOLANI » et 1559 de l’autre côté, dans un très bon état de conservation. Il y a d’autres bornes similaires remontant à 1559 au Tessin, qui sont les plus vieilles du canton.

Le Mendrisiotto fut annexé par la Suisse des XIII cantons en 1512 et la possession fut confirmée par le Traité de Fribourg (aussi appelé « la paix perpétuelle ») signé le 29 novembre 1516, après la défaite des Suisses à Marignan en septembre 1515 par le roi français François 1er. Après plusieurs guerres entre les rois de France et d’Espagne, la domination espagnole du duché de Milan (Mediolanum en latin) fut reconnue en 1559 par la paix du Cateau-Cambrésis.

Pour en savoir plus:
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F8898.php 

Photos (meilleures):
https://www.flickr.com/photos/cochabamba/3474052940/in/photostream/

13. Le train du Monte Generoso

Le Monte Generoso (1701.3m) est bien connu des familles tessinoises. La vue est exceptionnelle sur 360° et on peut apercevoir – par temps clair – de Milan au Grand Paradis et du Mont Rose à la Bernina. Un train à crémaillère amène sans effort les visiteurs de Capolago au sommet depuis 1890.

La ligne est maintenant électrifiée mais un train à vapeur (locomotive de 1890 !) assure le service dans les grandes occasions. En 1941, le fondateur de la Migros, Gottlieb Duttweiler, a racheté les installations ferroviaires alors à la dérive et transformé Le Monte Generoso en site touristique d’importance nationale.

En raison des travaux au Monte Generoso, le trafic ferroviaire est momentanément suspendu. Réouverture en 2016.

Image à gauche: Projet de station terminale du Monte Generoso par Mario Botta (ouverture 2016)

Pour en savoir plus :
http://www.montegeneroso.ch/fr/38/120-ans-d-histoire-ferroviaire.aspx

14. L’enclave de Campione d’Italia

Campione d’Italia, entièrement circonscrite par le Tessin, c’est d’abord le Casino Municipale. L’imposant bâtiment de Mario Botta construit en 2007 a le mérite de se voir de Lugano, de jour comme de nuit… Il est vrai qu’avec 55’000 m2 de surface au sol il est difficile de passer inaperçu !

Campione d’Italia est un paradis fiscal où les citoyens paient la moitié des impôts et taxes dont doivent s’acquitter les autres Italiens. La frontière avec la Suisse n’existe que sur les cartes, car en réalité beaucoup de détails rappellent le Tessin : plaques d’immatriculation, assurance maladie, sans oublier que le franc suisse est largement utilisé.

Pour en savoir plus :
http://www.miralux.ch/campione_fr.htm

15. Le musée suisse des douanes à Cantine di Gandria

Le pimpant Musée suisse des douanes est un petit bijou qui mérite le détour. Pour y aller, le mieux est de prendre le bateau à Lugano (fréquentes navettes à la belle saison). Très recommandable : débarquer à Caprino et suivre le sentier qui longe le lac jusqu’au musée (40 min. environ). Pour le retour, le bateau traverse le lac sur Gandria et poursuit vers Lugano. Mais on peut choisir de regagner Lugano à pied par le sentier de l’olivier ponctué d’intéressants panneaux explicatifs.

De Cantine de Gandria, les douaniers ont surveillé le trafic de contrebande (vu l’isolement du poste, seuls des douaniers célibataires y étaient affectés après 1921!). Les contrebandiers essayaient de passer des cigarettes mais aussi des biens de première nécessité comme du sucre, du café, du riz et du sel. Bien que petit, l’établissement dispose d’une muséologie moderne et captivante.

Pour en savoir plus:
http://www.afd.admin.ch/publicdb/newdb/zollmuseum/pdf/besuch_zollmuseum_fr.pdf

16. Le redoutable Splügen

A la différence de certains cols alpins, comme le Simplon, dont les améliorations routières ont rendu la traversée facile, le col du Splügen long de 65 km se mérite. Pour peu qu’on le fasse de Chiavenna à Splügen par gros temps, on s’en souviendra longtemps! Le col marque la frontière italo-suisse depuis la restitution en 1797 de la Valteline à la République Cisalpine par Bonaparte.

Le Splügen (2113m), avant la construction des grands tunnels alpins, était un passage très fréquenté avec un volume de marchandises important (2000 mules par mois). Cette intense activité générait une économie prospère. Pour les voyageurs transis qui avaient passé le col sans encombre, la descente sur Thusis par la Via Mala représentait une nouvelle épreuve…

Pour en savoir plus :
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F8823.php

Lac de Lei

17. Val et lac de Lei

Le val de Lei, en territoire italien depuis 1863, était inhabité et donc tout désigné à une exploitation hydro-électrique. Le barrage construit en 1962 a nécessité une convention entre l’Italie et la Suisse. Comme le lac représentait une menace en cas de rupture pour les vallées suisses en contrebas, la Confédération a demandé de garder le barrage sous son autorité. En compensation, un bout de territoire en aval du barrage a été transféré à l’Italie.

Ces accords transfrontaliers liés à l’exploitation de barrages ne sont pas rares. Un bon exemple est la retenue d’Emosson située entièrement en territoire suisse mais collectant les eaux du massif du Mont-Blanc. La centrale électrique est située en France au Châtelard. Un autre exemple est le lac de Livigno près de l’Ofenpass.

Pour en savoir plus :
http://de.wikipedia.org/wiki/Lago_di_Lei

18. Le Badile de Riccardo Cassin

Le massif du Bergell est composé d’un magnifique granite, bien plus jeune que ceux du Grimsel et du Mont Blanc formés avant la naissance des Alpes. Ce granite à gros grains fait la joie des rochassiers depuis les années 30.

En 1937, Riccardo Cassin et ses compagnons de cordée sont les premiers à vaincre la face nord-est du Piz Badile qui faisait figure d’épouvantail à l’époque. Cassin a joué un rôle décisif dans le développement de matériel adapté aux conditions extrêmes de l’alpinisme (comme les chaussons d’escalade par exemple). Il est mort dans son lit à l’âge de 100 ans et 7 mois ce qui, pour un homme qui a pris autant de risques toute sa vie, est un véritable exploit!

Pour en savoir plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Riccardo_Cassin

19. Entre Rhin et Vieux Rhin

Entre le Rhin à la hauteur d’Altstätten et le lac de Constance il n’y a qu’une différence d’altitude d’une vingtaine de mètres pour un parcours d’environ 18 km. Le fleuve n’y coulait pas plein nord mais passait à l’est de Diepoldsau avant d’effectuer un coude prononcé à l’ouest à St. Margrethen. En raison de la faible pente, les alluvions transportés par le Rhin alpin se déposaient et exhaussaient le lit du fleuve. Afin de mettre fin aux inondations catastrophiques du XIXème siècle, une correction du tracé a été entreprise dans les années 1896 à 1923 consistant à endiguer le fleuve et le conduire tout droit au lac, c’est-à-dire en accentuant la pente. La frontière restant la même le long de l’ancien Rhin (Alter Rhein), Diepoldsau passa à la fin des travaux de l’ouest à l’est du fleuve !

De grands projets sont en cours pour restituer au Rhin alpin en amont du lac de Constance un caractère naturel plus prononcé.

Pour en savoir plus :
href= »http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F8768.php?topdf=1″>http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F8768.php?topdf=1
http://www.alpenrhein.net/

20. Le delta du Rhin et la « borne » septante-trois

Le triangle entre le Rhin canalisé, le Vieux Rhin et le lac de Constance forme le delta d’eau douce du Rhin (à différencier du grand delta de mer aux Pays-Bas). Une réserve naturelle de plus de 2000 hectares a été créée en 1982 après des années de tractations. La réserve sert de refuge à 374 espèces d’oiseaux, ce qui en fait un site naturel d’importance internationale.

A l’embouchure du Vieux Rhin dans le lac de Constance se trouvait le point 73 reporté sur les cartes nationales jusqu’en 2013. Il s’agissait d’un point calculé à partir d’arrière-bornes qui se situent à gauche et à droite du Rhin. L’axe du Rhin est défini à partir de tout un ensemble d’arrière-bornes.

Pour en savoir plus :
http://www.rheindelta.com/

21. Les traversées incertaines du MF Romanshorn

Les MF Romanshorn et MF Euregia (MF: MotorFähre) sont les 2 bacs qui relient plusieurs fois par jour Friedrichshafen à Romanshorn à travers le lac de Constance. La ligne, créée en 1929, servait aussi au transport de wagons de chemin de fer jusqu’en 1976.

Quand le MF Romanshorn quitte le port, son statut devient incertain puisque il pénètre dans une sorte de no man’s land juridique. En effet, la frontière entre la Suisse et l’Allemagne n’a jamais été définie dans un traité. En fait, les frontières d’état ne sont pas claires depuis les traités de Westphalie en 1648 et la reconnaissance définitive (de jure) de l’indépendance de la Confédération suisse. Cette incertitude ne semble préoccuper que quelques professeurs de droit international …

Pour en savoir plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Navigation_sur_le_lac_de_Constance
http://www.welt.de/print-welt/article661125/Bodensee-ist-voelkerrechtlich-Niemandsland.html

Reichenau

Enluminure du Codex Egberti (bibliothèque de la ville de Trèves)

22. L’Abbaye de Reichenau

L’ile de Reichenau, reliée à la terre par une digue depuis 1838 se trouve à quelques centaines de mètres de la frontière. L’ile avec son abbaye, fondée en 724 par saint Pirmin, est inscrite depuis l’an 2000 au patrimoine mondial de l’UNESCO. Au début du XIème siècle, Reichenau est une école de manuscrits renommée qui produit les plus belles enluminures, comme celles du Codex Egberti.

Juste en face de l’ile, sur la rive suisse, se trouve Salenstein et le château Arenenberg où résida le prince Louis Napoléon, le future Napoléon III. L’immense parc de 13 hectares, longtemps laissé à l’abandon, est en cours de rénovation.

Pour en savoir plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Abbaye_de_Reichenau
http://www.myswitzerland.com/fr-ch/musee-napoleon-le-chateau-et-parc-d-arenenberg.html

Schaffhouse 1944

23. Le bombardement de Schaffhouse

Le canton de Schaffhouse, presque entièrement sur la rive droite du Rhin, développe une frontière «à méandres» de plus de 150 km avec l’Allemagne. A plusieurs endroits le tracé défie même toute logique!

Le samedi 1er avril 1944 à l’heure du marché des escadrilles américaines ont lâché sur la ville de Schaffhouse des centaines de bombes incendiaires et explosives, tuant des dizaines de personnes et occasionnant de grands dégâts. Erreur de navigation ou action de rétorsion?  On ne le saura probablement jamais. Suite aux excuses du président Franklin Roosevelt, le gouvernement américain versa à la Suisse en 1949 plus de 62 millions de francs à titre de dédommagement pour les pertes humaines et les destructions subies en 1944, à la suite des bombardements de Schaffhouse, Zurich et Bâle.

Pour en savoir plus :
http://www.schaffhausen-nostalgie-foto.ch/266,0,schaffhausen-bombardiert-,index,0.html
http://www.ideesuisse.ch/256.0.html?L=1&no_cache=1&tx_ttnews[backPid]=217&tx_ttnews[list]=349%2C1376%2C631%2C273%2C1525%2C1523%2C1524%2C233%2C1522%2C1561%2C1379&tx_ttnews[tt_news]=349 (vidéo Ciné-journal suisse 5’12 ‘’)

24. Les chutes du Rhin

Situées à 1 km de la frontière, les chutes du Rhin sont impressionnantes, surtout lors de fortes crues. Les étapes de leur formation il y a environ 17’000 à 14’000 ans (donc très récemment, géologiquement parlant) sont bien établies. C’est la conséquence directe des glaciations successives. La cascade se trouve à l’endroit où un lit de calcaire du Jurassique, pierre plus dure (en amont), fait place à un lit de sédiments ou de pierre plus friable (en aval).

Une cinquantaine de km plus bas que les chutes, l’Aar, principal affluent suisse du Rhin, lui apporte bien plus d’eau qu’il n’en a lui-même. Le Rhin a un débit bien différencié entre l’été et l’étiage d’hiver (à Bâle : 1500 m3/s en juin pour 700 m3/s en janvier). Mais des années exceptionnelles ne sont pas rares : en 1858 le débit à Bâle n’était que de 202 m3/s, environ 50 m3 de plus que le Rhône à Genève. Difficile de naviguer dans ces conditions!

Pour en savoir plus :
http://www.encyclopedie.bseditions.fr/article_complet.php?pArticleId=11&articleLib=Le+Rhin

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24a. Laufenburg – une histoire particulière

Aspects historiques

Laufenburg, les deux côtés du Rhin, faisait depuis le 12ème siècle partie des territoires Habsbourg – on parle plus tard de l’Autriche Antérieure – et ceci jusqu’au traité de Lunéville en février 1801. Napoléon décida alors que le Rhin devrait être la frontière de la République Helvétique. Laufenburg fut divisé en deux, la partie sud devient partie du canton Fricktal et après l’Acte de Médiation en 1803 fut rattachée au canton d’Argovie. La partie nord devient partie du Grand Duché de Baden, aujourd’hui le Land allemand de Bade-Wurtemberg.

Aspects géographiques

Le Rhin s’est creusé un passage à travers les roches cristallines (gneiss rouge) de la Forêt Noire, ce qui a donné une gorge, seulement 12 mètres de large, avec des rapides (10 mètres de dénivellation) sur 1 kilomètre. Le mot Laufen signifiait rapides ou cascade en vieil allemand. Pendant longtemps des flotteurs (Laufenknechte) pilotaient les bateaux à travers les rapides du Laufen, pendant que les marchandises étaient transportées en char par voie terrestre, ce qui représentait une source de revenus importante pour la ville. Les trains de bois devaient être disloqués avant les rapides, puis reformés après le Laufen.

Avec la construction du barrage pour l’usine électrique de Laufenburg – d’ailleurs le premier sur le Rhin et le plus grand à l’époque – entre 1909 et 1914, les rapides ont été noyées. La profession de flotteurs devient caduque. Le pont actuel fut construit en 1910.

Pour en savoir plus:
http://histoire-suisse.geschichte-schweiz.ch/republique-helvetique-1798.html
https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/001742/2016-09-12/

Augusta 1

Le pont traversait le Rhin à cet endroit précis

25. Le pont d’Augusta Raurica

Le Castrum Rauracense, qui a succédé à Augusta Raurica dont la période de prospérité a décliné au IIIème siècle de notre ère sous la pression des peuples du nord, était une place forte situé à la tête du pont sur le Rhin. Déjà à cette époque donc, le fleuve jouait le rôle de frontière. Quand on voit le Rhin aujourd’hui, très large à cet endroit, on se demande comment les Romains ont bien pu construire des piles de pont dans un courant puissant et une profondeur qu’on imagine de plusieurs mètres…

Le site d’Augusta Raurica est actuellement bien aménagé avec des panneaux explicatifs en plusieurs langues. Le musée, tout petit, présente les objets découverts lors des fouilles dont le célèbre trésor composé de 270 pièces en argent. On y voit de nombreuses monnaies d’une qualité incroyable (elles n’ont jamais été utilisées) et de magnifiques objets d’apparat dont le superbe plat d’Achille.

Pour en savoir plus :
http://www.augustaraurica.ch/fr/